AVERTISSEMENT : la lecture d’un excellent article du Midwestern Doctor m’a décidé à rédiger ce court article sur les bienfaits de l’exposition solaire. Vous y trouverez, sous la forme d’une Foire Aux Questions, les principales interrogations sur l’exposition au soleil que j’ai reçues ces dernières années, notamment sur Twitter/X. Ces informations résultent de la lecture d’une centaine d’articles scientifiques et de plusieurs monographies sur le sujet. Toutes les informations ci-dessous sont sourcées. Cependant, bien que je sois docteur en biologie, je ne suis pas médecin et mon avis ne remplacera jamais celui de votre médecin traitant, qui connait certainement mieux votre état de santé que moi. Si cet article vise ainsi à promouvoir un changement de paradigme médiatique et scientifique grâce au nombre croissant de publications sur les bienfaits de l’exposition au soleil, il ne vise nullement à remplacer un avis médical.
Pourquoi doit-on s’exposer au soleil ?
La réponse la plus directe est que s’exposer au soleil permet de vivre en bonne santé et plus longtemps. La recherche a démontré que s’exposer régulièrement au soleil était associé à un risque moindre de décès, de maladie cardiovasculaire et de cancers. Ne pas s’exposer à la lumière est une cause majeure de mortalité dans les pays occidentaux. Des chercheurs ont calculé qu’une personne non-fumeuse ne s’exposant pas au soleil avait un risque de décès égal à celui d’un fumeur s’exposant au soleil. Le soleil est donc aussi bénéfique pour la santé que le tabac est néfaste, les effets de l’un compensant ceux de l’autre. Ce que j’appelle le « mode de vie terricole » (rester enfermé, notamment devant des écrans) est responsable d’un demi-million de décès annuels en Europe ! C’est un grave problème de santé humaine qui n’a jusqu’à présent reçu aucune attention de la part des pouvoirs publics.
Comment le soleil agit-il bénéfiquement sur l’organisme ?
Les rayonnements UV-B du soleil constituent la meilleure source de “vitamine” D pour notre corps, bien qu’une part importante puisse aussi provenir de l’alimentation. J’écris “vitamine” entre guillemets parce que cette dernière n’est en réalité pas une vitamine, mais une hormone. La vitamine D est indispensable au fonctionnement normal de notre organisme et agit sur le métabolisme osseux (d’où des risques de rachitisme ou de fracture chez les personnes carencées), la fonction du muscle cardiaque, le système immunitaire (une des raisons pour lesquelles nous tombons plus facilement malades en hiver), la régulation de l’inflammation, la santé du cerveau, le microbiome, la protection des vaisseaux sanguins et la fonction musculaire entre autres. Voilà pourquoi les populations d’agriculteurs vivant aux hautes latitudes ont développé une peau claire : le soleil a constitué leur source la plus importante de vitamine D lors de la révolution néolithique et le passage d’une alimentation animale riche en vitamine D (gibier, poisson gras, etc.) à une alimentation comprenant majoritairement des céréales (blé, orge, etc.) pauvres en vitamine D. Les premiers chasseurs-cueilleurs arrivés en Europe avaient en effet la peau foncée et les peuples de chasseurs vivant aux hautes latitudes (comme les Inuits ou les indigènes de la Terre de Feu) ont conservé cette peau très mate. En revanche, les Européens, pratiquant l’agriculture jusqu’au 60ᵉ parallèle et même au-delà, ont dû développer un épiderme plus clair, synthétisant plus efficacement la vitamine D à partir des rayons du soleil que les peaux plus foncées.
Les effets bénéfiques du soleil ne s’arrêtent cependant pas à la seule synthèse de vitamine D. Les UV-A (autres types d’UV composant le rayonnement solaire) jouent un rôle dans la production de monoxyde d’azote (NO) qui a des effets vasodilatateurs, régulateurs de l’apoptose cellulaire, microbicides, etc. Le NO est notamment indispensable à une bonne régulation de la tension artérielle et au fonctionnement de notre système circulatoire. Les autres fonctions du NO sont innombrables et résumées ci-dessous. Ainsi, si l’équation soleil = vitamine D est partiellement vraie, le soleil agit aussi via le NO et d’autres mécanismes sur de très nombreuses fonctions de notre corps.
Combien de fois dois-je sortir pour tirer profit des bienfaits du soleil ?
Sortez aussi souvent et longtemps que possible, y compris lorsque le temps est couvert, afin d’habituer votre organisme à la lumière naturelle. Une erreur fréquente consiste à ne sortir que lorsque le temps est chaud et ensoleillé, et donc n’exposer son corps que lorsque les radiations solaires sont fortes. Si vous faites cela, vous vous surexposez, statistiquement parlant (vous ne recevrez en effet que la partie droite de la distribution de radiation solaire). Sortez donc même si le temps est couvert et/ou frais, tout en adaptant évidemment votre exposition aux conditions climatiques (inutile de jouer au cow-boy en sortant en t-shirt en plein hiver et risquer d’attraper une pneumonie). Sortez donc lors de la mauvaise saison et vous constaterez, divine surprise, que les premiers rayons du printemps ne vous causeront pas de coup de soleil.
Comment m’exposer ?
Cette question est cruciale et la meilleure réponse que je puisse vous faire est de prendre en compte 1) votre carnation (cf. figure ci-dessus) 2) votre état de santé et 3) la région dans laquelle vous vous trouvez. Si vous êtes pâle ou ne bronzez pas (comme beaucoup de roux), vous ne pourrez supporter qu’un soleil « celte » ou un ciel très nuageux dans une région plus ensoleillée. Si votre peau picote ou rougit lors de votre exposition, c’est un signal d’alarme que votre organisme a reçu trop d’UV. Couvrez-vous et cessez de vous exposer pour le moment. Si vous souffrez d’une condition médicale incompatible avec une exposition au soleil, ne vous exposez évidemment pas, le risque n’en vaut pas la peine. Si votre carnation correspond à votre région, que vous n’avez pas brûlé, que vous ne souffrez pas d’une maladie causée par le soleil et que vous vous êtes « entrainé » à la mauvaise saison, allez-y ! Si vous craignez le coup de soleil à la première exposition, exposez-vous par temps nuageux. L’intensité lumineuse, même par temps nuageux ou à l’ombre est de toute manière très supérieure à celle que l’on retrouve dans un bâtiment !
Dois-je utiliser de la crème solaire ?
Je suis personnellement opposé à la crème solaire pour deux raisons :
-la crème solaire, en limitant la capacité de votre peau à brûler, contribue à vous surexposer au soleil. Se badigeonner de crème solaire crée ainsi un faux sentiment de sécurité alors que le rougissement de la peau est un signal d’alarme de votre organisme, indiquant qu’il ne peut plus recevoir de rayonnement solaire. Une méta-analyse sur le sujet a conclu qu’il n’y avait aucune corrélation négative entre utilisation de crème solaire et apparition du mélanome.
-plusieurs crèmes solaires commerciales contiennent des composés issus de l’industrie pétrochimique, eux-mêmes cancérigènes. Le bénéfice théorique de l’utilisation de la crème solaire contre les UV serait ainsi contrebalancé par les produits cancérigènes qui la composent. Privilégiez donc les huiles naturelles si vous décidez de vous recouvrir avant de vous exposer.
Mais m’exposer au soleil risque de me causer un cancer de la peau, non ?
Le terme de cancer de la peau recouvre des pathologies qui n’ont rien à voir les unes avec les autres en termes de mortalité. Il existe grossièrement trois types de cancers de la peau : le carcinome basocellulaire (BCC en anglais), le carcinome épidermoïde (SCC en anglais) et le mélanome. Le premier est le plus fréquent et le moins dangereux (il ne produit jamais de métastases ou presque). Le taux de survie des patients après diagnostic de ce cancer est estimé à… 100%. Le second est bien moins fréquent, mais plus à craindre, car potentiellement métastatique. Son taux de survie est de 95%. Le dernier, le mélanome, est le plus rare (1% seulement des diagnostics de cancer de la peau) mais le plus dangereux de tous. C’est lui le responsable de la majorité des décès attribués aux “cancers de la peau”. Son taux de survie est de 87%. Cependant, le mélanome n’est responsable que de 1% de tous les décès par cancer, loin derriere le cancer du poumon ou du côlon par exemple.
Donc c’est bien ça, le soleil cause le cancer de la peau !
Oui et non. Si l’incidence du carcinome basocellulaire et du carcinome épidermoïde, qui sont les deux cancers de la peau les plus bénins, est positivement corrélée à l’exposition régulière au soleil, celle du mélanome n’est pas corrélée à l’exposition régulière. D’après les chercheurs, l’incidence du mélanome est soit 1) décorrélée avec l’exposition au soleil (ce qui expliquerait pourquoi il a tendance à apparaitre à des endroits peu exposés comme les aisselles, la cavité buccale, le dessous des pieds, etc.), 2) corrélée avec une exposition intermittente (rester enfermé onze mois par an et se griller sur une plage corse pendant un mois). Dit autrement, la forme la plus grave de cancer de la peau est causée par une exposition irrégulière au soleil. Pour rappel, le manque de soleil tue environ un demi-million d’Européens chaque année, le mélanome quinze mille, soit trente-deux-fois moins !
Pourquoi personne ne parle des bienfaits du soleil dans les médias ? Pourquoi continue-t-on de publier chaque année les mêmes manchettes anxiogènes à l’approche de l’été ?
Il existe toujours un décalage entre la publication des dernières études scientifiques et la mise en œuvre de nouvelles politiques sanitaires. Cet effet d’inertie propre aux États et corps constitués bénéficie pour le moment aux politiques “conservatrices” des années 80-2000 résolument héliophobes. De plus, les travaux que j’ai cités proviennent souvent de chercheurs et biologistes, pas nécessairement de dermatologues qui constituent le cœur du système héliophobe. Heureusement, partout dans le monde, des médecins (y compris des dermatologues !) commencent à revoir leur copie et déconstruisent progressivement le mythe d’un soleil mortel. Une éthique solaire, plus respectueuse du fonctionnement de notre organisme et de sa relation symbiotique avec l’astre de jour émerge petit à petit et nous aidera à surmonter les défis de la Révolution Terricole.
Quels livres me conseilleriez-vous sur les bienfaits du soleil ?
-Embrace the Sun, de Marc B. Sorenson et William B. Grant. Cet ouvrage tres bien documenté dresse un état des lieux scientifique sur l’apport positif du soleil avec plus de 1200 références. De la digestion au cancer en passant par le squelette, l’humeur ou la vitamine D, vous apprendrez tout ce qu’il faut savoir sur le sujet. Un des co-auteurs du livre, diplomé de Berkeley, a publié de nombreux articles sur la vitamine D et l’effet du rayonnement solaire sur l’organisme. Si vous ne le trouvez pas sur les sites de commerce en ligne, vous pourrez le télécharger gratuitement ici.
-The Healing Power of the Sun, de Richard Hobday. Ce livre, écrit par un ingénieur nous montre comment tirer partie au quotidien de l’énergie solaire afin d’améliorer notre état physique et notre santé. Certains passages sur les traitements de la grippe espagnole et du COVID sont éclairants et nous montrent que les politiques publiques en la matiere ont bien du retard par rapport aux découvertes des chercheurs.
-A la poursuite du soleil, de Linda Geddes. Journaliste de profession, l’autrice mêle interviews avec des chercheurs et des patients pour nous décrire les effets du soleil et de la luminosité sur les rythmes circadiens, la santé mentale et l’humeur.
Merci pour vos articles très intéressants.
Based and solar-pilled